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Les vêpres du dimanche - Psaume 110 (hb 111)

01 Alléluia ! De tout cœur je rendrai grâce à Yhwh dans l'assemblée, parmi les justes.

02 Grandes sont les œuvres de Yhwh ; tous ceux qui les aiment s'en instruisent.

03 Magnificence et splendeur dans ses actions : à jamais se maintiendra sa justice.

04 De ses merveilles il a laissé un mémorial ; Yhwh est tendresse et pitié.

05 il a donné de la nourriture à ceux qui le craignent, gardant toujours mémoire de son alliance.

06 Il a révélé à son peuple la puissance de ses œuvres, lui donnant l’héritage des nations.

07 Justice et vérité, les œuvres de ses mains, solidité, tous ses préceptes,

08 établis pour toujours et à jamais, mis en œuvre dans la droiture et vérité !

09 Il apporte la délivrance à son peuple ; son alliance est promulguée pour toujours : saint et redoutable est son nom.

10 La sagesse commence avec la crainte de Yhwh. Bien intelligents tous ceux qui la pratiquent. A jamais se maintiendra sa louange.

 

(Traduction Bible liturgique avec des modifications tirées d’autres traductions – Vesco, Bible Bayard, Bible Osty, Bible de Jérusalem). Toutes les autres citations dans l’article sont tirées de la traduction de la Bible liturgique.

Photo d'entête : Giusto de Menabuoi (1330-1390), "La Création", fresque du baptistère du Dôme de Padoue. (Photo Wikimedia commons). Elle montre le Créateur sous la forme de Dieu le Fils.

 

Psaume 110 dans le Psautier d'Eleonore d'Aquitaine (vers 1185) (Photo Wikimedia commons)

Psaume 110 dans le Psautier d'Eleonore d'Aquitaine (vers 1185) (Photo Wikimedia commons)

Louange à Dieu pour la puissance de ses œuvres qui libèrent

 

Le psaume 110 est le deuxième des Vêpres du Dimanche. Nous avons étudié auparavant le premier, le psaume 109, qui inaugure « en fanfare » cette heure liturgique qui marque la fin de la journée avec un caractère messianique très affirmé.

http://www.bible-parole-et-paroles.com/2020/07/les-vepres-du-dimanche-psaume-109-hb-110.html

 

Le psaume 110 est introduit par un Alleluia qui semble le destiner à un usage liturgique (dans l’assemblée au v. 1 – il a laissé un mémorial au v. 4, cf. Ex 23, 14 +) sans oublier le côté didactique. L’action de grâce forme inclusion (vv. 1, 10) et célèbre la puissance (v. 6), la beauté (v. 3), la droiture (v. 8) et justice (v. 3, 7), la vérité (v. 7, 8), la permanence des œuvres de Yhwh qui apportent la délivrance à ceux qui ont l’intelligence de mettre en pratique les préceptes de l’alliance qu’elles révèlent.

 

L’idée de permanence traverse tout le poème :

à jamais se maintiendra sa justice (v. 3)

il a laissé un mémorial (v. 4)

gardant toujours mémoire de son alliance (v. 5)

solidité, tous ses préceptes (v. 7)

établies pour toujours et à jamais (v. 8)

son alliance est promulguée pour toujours (v. 9)

A jamais se maintiendra sa louange (v. 10)

 

Les œuvres de Yhwh se signalent par la justice (v. 3) (ou justesse, v. 7), synonyme ici de vérité et de droiture (vv. 7, 8), qui leur confère solidité et stabilité (vv. 7, 8).

Par œuvres, il faut entendre l’œuvre de ses mains, c’est à dire la Création (v. 7) qui est le fondement initial de l’Alliance déclinée ensuite en préceptes (v. 7, 9). La garantie divine de l’Alliance (v. 5) est la tendresse et la pitié de Yhwh (v. 4) dont il est fait mémoire à travers ses œuvres, bienfaits accordés à son peuple : la manne (v. 5), la délivrance (d’Egypte, de Babylone, mais aussi de divers ennemis), l’héritage des nations (terres promises à Israël après l’Exode).

A ces œuvres divines de justice et de vérité doit répondre la mise en œuvre pratique des préceptes de l’Alliance par les Israélites (vv. 1, 10) :

 

Le Seigneur dit : « Voici que je vais conclure une alliance. Devant tout ton peuple, je vais faire des merveilles qui n’ont été créées nulle part, dans aucune nation. Tout le peuple qui t’entoure verra l’œuvre du Seigneur, car je vais réaliser avec toi quelque chose d’extraordinaire.

Observe donc bien ce que je t’ordonne aujourd’hui. (Ex 34, 10-11)

Marc Chagall (1887-1985), "Moïse recevant les tables de la Loi" (1960-66), Musée Chagall, Nice. (Photo Wikimedia commons)

Marc Chagall (1887-1985), "Moïse recevant les tables de la Loi" (1960-66), Musée Chagall, Nice. (Photo Wikimedia commons)

Il leur a donné les terres des nations, en héritage, le travail des peuples, pourvu qu'ils gardent ses volontés et qu'ils observent ses lois. (Ps 104, 44, 45)

 

Une lecture chrétienne à visée christologique unit les psaumes 109 et 110 :

Si le psaume 109 envisage la soumission des nations dans un contexte de guerre menée par un messie-roi (Ps 109, 5-6), le psaume 110 la voit plutôt comme un don (v. 6) résultant de la puissance des œuvres divines annonçant, celle même de l’Esprit Saint envoyé par Jésus aux disciples qui auront aussi à convaincre les nations d’observer les commandements :

 

Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre »Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28, 18-20)

 

Si le psaume 109 envisage le sacerdoce royal du Christ (Ps 109, 4), le psaume 110 rappelle de don de la manne (v. 4), mémorial de l’Alliance comme Jésus le soulignera au cours du dernier repas pascal du Jeudi Saint en invitant ses disciples à rompre comme lui le pain en mémoire de lui :

 

Puis, ayant pris du pain et rendu grâce, il le rompit et le leur donna, en disant : « Ceci est mon corps, donné pour vous. Faites cela en mémoire de moi. »

 (Lc 22, 19)

 

L’eucharistie, née de ce repas pascal rappelant la libération d’Egypte, célébrée le dimanche, rappelle également la délivrance des péchés, victoire sur la mort couronnée par la résurrection du Christ :

Il apporte la délivrance à son peuple ; son alliance est promulguée pour toujours (Ps 110, 9)

Dans la bouche de Zacharie : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, qui visite et délivre son peuple. (Lc 1, 68)

« Réunis avant l’aube pour célébrer l’eucharistie, les premiers chrétiens vivaient dans le souvenir de la Résurrection de Jésus. Et en même temps, ils attendaient que la Résurrection devienne une réalité pour eux aussi. Ils attendaient l’aube où reviendrait, avec la lumière, le Christ glorieux ». (« Missel quotidien des fidèles », Feder, p. 7)

 

Pour commenter ce psaume, j’ai choisi une traduction de la Bible liturgique remaniée. C’est la plus couramment utilisée pour le chant en français de ce psaume dans l’office des vêpres. Je donnerai pour chaque verset la traduction latine de la Nova Vulgata (NV), initiée par le Pape Paul VI après le concile Vatican II et promulguée en 1979 par le Pape Jean-Paul II. Elle diffère de la Vulgata Clementina (VC) en cours avant celle-ci et que je donnerai aussi car elle est maintenue dans certains monastères attachés à la liturgie traditionnelle. C’est aussi la Vulgata clementina que nous retrouvons dans les pièces grégoriennes et les œuvres polyphoniques anciennes.

 

Christ Pantocrator (milieu XVIIème siècle), mosaïque à Cefalù (Sicile). (Photo Wikimedia commons)

Christ Pantocrator (milieu XVIIème siècle), mosaïque à Cefalù (Sicile). (Photo Wikimedia commons)

Compréhension

 

01 Alléluia ! De tout cœur je rendrai grâce à Yhwh dans l'assemblée, parmi les justes.

NV (Nova Vulgata) : ALLELUIA. Confitebor Domino in toto corde meo, in consilio iustorum et congregatione.

VC (Vulgata Clementina) : Confitebor tibi, Domine, in toto corde meo : in consílio iustorum, et congregatione.

 

Comme nous l’avons déjà mentionné, l’action de grâce est publique. Les justes représentent les fidèles « craignant Dieu » (Ps 110, 10) de l’assemblée :

Tu seras ma louange dans la grande assemblée ; devant ceux qui te craignent, je tiendrai mes promesses. (Ps 20, 26)

De tout cœur marque l’engagement complet du psalmiste :

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. (Dt 6, 5)

 

 

02 Grandes sont les œuvres de Yhwh ; tous ceux qui les aiment s'en instruisent.

NV  Magna opera Domini, exquirenda omnibus, qui cupiunt ea.

VC Magna opera Domini : exquisita in omnes voluntates eius.

 

L’objet de la louange ce sont les œuvres du Seigneur. Les versions latines s’inspirent de la Septante : recherchées par tous ceux qui les désirent (NV) qui en ont la volonté (VC). BL (Bible liturgique) et Vesco s’en inspirent pour leur traduction.

Jacquet traduit (d’après la tradition hébraïque) : ordonnées à ses fins bienveillantes.

Cette traduction a le mérite de mettre l’accent sur la thématique de ce psaume : la puissance des œuvres de Yhwh est au service de sa justice (v. 3) et de sa bienveillance (v. 4).

 

 

03 Magnificence et splendeur dans ses actions : à jamais se maintiendra sa justice.

NV Decor et magnificentia opus eius, et iustitia eius manet in saeculum saeculi.

VC Confessio et magnificentia opus eius : et iustitia eius manet in sæculum sæculi.

 

Les œuvres de Yhwh ne sont pas achevées définitivement pour être admirées et louées (la création), elles se continuent (ses actions ou son ouvrage, ce qu’il fait) et se manifestent par ses interventions bienfaisantes (vv. 5, 6, 9) signes de sa justice sans fin.

Le terme Confessio de VC vient du grec de la septante exomológēsis (aveu, confession). Comme en français d’ailleurs, il signifie confession au sens de l’aveu d’une faute :

Et Josué dit à Achar : Glorifie aujourd'hui le Seigneur Dieu d'Israël, donne confession à Dieu, et déclare-moi ce que tu as fait ; ne me cache rien (Jos 7, 19)

 

La proclamation publique ne concerne pas forcément une faute mais aussi une croyance, à laquelle peut s’ajouter une nuance laudative :

Et Judith entonna ce cantique de louanges au milieu de tout Israël, et tout le peuple le répéta. (Jd 15,14)

Une des traductions de Saint Jérôme (Vulgate d’après le texte hébreu) emploie d’ailleurs gloria (gloria et decor opus eius)

On trouve d’ailleurs le verbe grec Exomologèsomaí (confitebor en latin) de même racine au v. 1 traduit sans hésitation dans son contexte par je rendrai grâce.

On pourrait ainsi traduire confessio dans VC : Manifestation de sa gloire et splendeur son œuvre.

La « justice » est plutôt ici à considérer comme la conformité au droit, à l’ordre des choses voulu par Yhwh. Les justes du v. 1 sont ceux qui la suivent et se comportent en vérité avec Yhwh.

Qu’ils crient de joie ceux qui se complaisent dans ma justice (Ps 34, 27 - Trad. BJ)

Et ma langue murmurera ta justice, tout le jour, ta louange (Ps 34, 28 – Trad. BJ)

 

 

04 De ses merveilles il a laissé un mémorial ; Yhwh est tendresse et pitié

NV Memoriam fecit mirabilium suorum, misericors et miserator Dominus

VC Memóriam fecit mirabílium suórum, miséricors et miserátor Dóminus

 

La mémoire des œuvres extraordinaires que Yhwh a réalisées doit être transmise aux générations qui viennent :

Nous le redirons à l'âge qui vient, sans rien cacher à nos descendants : les titres de gloire du Seigneur, sa puissance et les merveilles qu'il a faites.

Il fixa une règle en Jacob, il établit en Israël une loi, loi qui ordonnait à nos pères d'enseigner ces choses à leur fils,

pour que l'âge suivant les connaisse, et leur descendance à venir. Qu'ils se lèvent et les racontent à leurs fils

pour qu'ils placent en Dieu leur espoir et n'oublient pas les exploits du Seigneur mais observent ses commandements. (Ps 77, 4-7)

Les fêtes liturgiques ont pour rôle de rendre le passé à nouveau présent, lui redonner vie en le réactualisant, par exemple la sortie d’Egypte :

Ce jour-là sera pour vous un mémorial. Vous en ferez pour le Seigneur une fête de pèlerinage. C’est un décret perpétuel : d’âge en âge vous la fêterez. (Ex 12, 14)

La Justice de Yhwh telle que nous l’avons définie ci-dessus ne se réduit à des considérations juridiques qui conduisent à un jugement, elle est avant tout expression de tendresse et de pitié et prend en compte la fragilité de l’être humain :

Leur coeur n'était pas constant envers lui ; ils n'étaient pas fidèles à son alliance.

Et lui, miséricordieux, au lieu de détruire, il pardonnait ; maintes fois, il retint sa colère au lieu de réveiller sa violence.

Il se rappelait : ils ne sont que chair, un souffle qui s'en va sans retour. (Ps 77, 37-39)

 

Voilà bien la suprême merveille proposée à la célébration mémorielle et que loue le psalmiste : l’éternelle justice de Yhwh qui est tendresse et pitié !

 

Giovanni Battista Tiepolo (1696-1770), "Récolte de la manne", Brescia (Italie). (Photo Wikimedia commons)

Giovanni Battista Tiepolo (1696-1770), "Récolte de la manne", Brescia (Italie). (Photo Wikimedia commons)

05 il a donné de la nourriture à ceux qui le craignent, gardant toujours mémoire de son alliance.

NV Escam dedit timentibus se ; memor erit in saeculum testamenti sui.

VC Escam dedit timentibus se. Memor erit in sæculum testamenti sui.

 

Au titre des merveilles dont il est fait mémoire peut figurer évidemment l’épisode de la manne dans le désert :

Le Seigneur dit à Moïse : « Voici que, du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous. Le peuple sortira pour recueillir chaque jour sa ration quotidienne, et ainsi je vais le mettre à l’épreuve : je verrai s’il marchera, ou non, selon ma loi. (Ex 16, 4)

En effet cette mise à l’épreuve signifie que Yhwh accorde la nourriture à ceux qui le craignent, ceux qui ont foi en lui, comme le rappellera le v. 10 :

La sagesse commence avec la crainte de Yhwh

Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! Heureux qui trouve en lui son refuge !

Saints du Seigneur, adorez-le : rien ne manque à ceux qui le craignent. (Ps 33, 8.10)

 

Le secret du Seigneur est pour ceux qui le craignent ; à ceux-là, il fait connaître son alliance. (Ps 24, 14)

 

Cette nourriture, comme tout bienfait de Yhwh, est signe de son alliance dont il fait ici mémoire.

Sur l’épisode de la manne, on peut se reporter à mon article :

http://www.bible-parole-et-paroles.com/2015/03/man-hou.html

 

 

06 Il a révélé à son peuple la puissance de ses œuvres, lui donnant l’héritage des nations.

NV Virtutem operum suorum annuntiavit populo suo, ut det illis hereditatem gentium

VC virtútem óperum suórum annuntiábit pópulo suo : Ut det illis hereditátem géntium.

 

On perçoit ici l’allusion à la sortie d’Egypte et à l’installation en Canaan qui révèlent la force de l’action de Yhwh et la suprématie de sa justice sur les idoles :

Parce qu’il a aimé tes pères et qu’il a choisi leur descendance, en personne il t’a fait sortir d’Égypte par sa grande force, pour chasser devant toi des nations plus grandes et plus puissantes, te faire entrer dans leur pays et te le donner en héritage, comme cela se réalise aujourd’hui. Sache donc aujourd’hui, et médite cela en ton cœur : c’est le Seigneur qui est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre ; il n’y en a pas d’autre. (Dt 4, 37-39)

 

Vincent Adriaenssen (1595-1675), "Moïse conduisant les Israélites en Terre promise", Musée Chalons en Champagne.. (Photo Wikimedia commons)

Vincent Adriaenssen (1595-1675), "Moïse conduisant les Israélites en Terre promise", Musée Chalons en Champagne.. (Photo Wikimedia commons)

07 Justice et vérité, les œuvres de ses mains, solidité, tous ses préceptes,

08 établis pour toujours et à jamais, mis en œuvre dans la droiture et vérité !

NV opera manuum eius veritas et iudicium. Fidelia omnia mandata eius,

NV confirmata in saeculum saeculi, facta in veritate et aequitate.

VC Opera manuum eius veritas et iudicium. Fidelia omnia mandata eius :

VC confirmata in sæculum sæculi, facta in veritate et æquitate.

 

Par les œuvres de ses mains il faut retenir la Création du monde :

Les cieux proclament la gloire de Dieu, le firmament raconte l'ouvrage de ses mains. (Ps 18, 2)

Autrefois tu as fondé la terre ; le ciel est l'ouvrage de tes mains. (Ps 101, 26)

 

On retrouve aussi cette expression dans Ps 8, 4 ; 91, 5 ; 94, 5.

Le verset 7 présente en un raccourci saisissant le lien entre Création et préceptes divins. La contemplation de la Sagesse qui régit la Création permet d’aborder et comprendre les préceptes divins.

Or la Sagesse est avec toi, elle qui sait tes œuvres ; elle était là quand tu fis l’univers ; elle connaît ce qui plaît à tes yeux, ce qui est conforme à tes décrets. (Sg 9, 9)

 

 

Les cieux proclament la gloire de Dieu, le firmament raconte l'ouvrage de ses mains.

Le jour au jour en livre le récit et la nuit à la nuit en donne connaissance.

Pas de paroles dans ce récit, pas de voix qui s'entende ; mais sur toute la terre en paraît le message et la nouvelle, aux limites du monde. (Ps 18, 2-5)

 

Connais-tu les décrets des cieux ? appliques-tu leur charte sur la terre ? (Jb 38, 33)

 

Louis Jacquet cite une paraphrase éclairante de Corneille pour ces versets du Ps. 18 (T.1, p. 468) :

« Aux quatre coins du monde, ils parlent un langage

qu’entendent toutes les nations ;

Et des plus noirs climats l’hôte le plus sauvage

en comprend les instructions. »

 

On peut comprendre combien cette interprétation du v. 7 peut résonner en phase avec l’encyclique Laudato Si’ du Pape François (2015) :

 

Cette contemplation de la création nous permet de découvrir à travers chaque chose un enseignement que Dieu veut nous transmettre, parce que « pour le croyant contempler la création c’est aussi écouter un message, entendre une voix paradoxale et silencieuse » (Citation de Jean-Paul II). (Laudato Si’ n° 85)

 

Dieu a créé le monde en y inscrivant un ordre et un dynamisme que l’être humain n’a pas le droit d’ignorer. (Laudato Si’, n° 221)

 

L’être humain est appelé à respecter la création avec ses lois internes, car « le Seigneur, par la sagesse, a fondé la terre » (Pr 3, 19) (Laudato Si’, n° 69)

 

Le vocabulaire commun des versets 7 et 8 s’appliquant tant à la Création et qu’aux préceptes divins, marque encore plus le lien entre ceux-ci :

Justice = droiture

Vérité (2 fois)

Solidité = établis pour toujours et à jamais

Jan Brueghel l'Ancien (1568-1625), "Adam et Eve dans le jardin d'Eden". (Photo Wikimedia commons)

Jan Brueghel l'Ancien (1568-1625), "Adam et Eve dans le jardin d'Eden". (Photo Wikimedia commons)

09 Il apporte la délivrance à son peuple ; son alliance est promulguée pour toujours : saint et redoutable est son nom.

NV Redemptionem misit populo suo, mandavit in aeternum testamentum suum.

Sanctum et terribile nomen eius.

VC Redemptionem misit populo suo : mandavit in æternum testamentum suum.

Sanctum et terribile nomen eius.

 

Yhwh est un Dieu qui libère. On pense bien sûr ici à la sortie d’Egypte ou de l’exil à Babylone. Vesco signale que le mot hébreu pedût signifie rachat, délivrance et qu’on le retrouve pour signifier « la libération spirituelle des fautes d’Israël » :

Attends le Seigneur, Israël. Oui, près du Seigneur, est l'amour ; près de lui, abonde le rachat. C'est lui qui rachètera Israël de toutes ses fautes. (Ps 129, 7-8)

 

L’Alliance de Yhwh avec son peuple repose sur la libération de celui-ci renouvelée au gré des circonstances et garantie pour toujours (cf. l’idée de permanence qui traverse tout le psaume abordée en introduction).

Yhwh, ou ce qui revient au même, son nom (qu’on ne précise pas d’ailleurs, cf. Ex 3, 13-14) est Saint :

En introduisant, en Lv 19, une longue série de commandements de nature éthique, Yhwh annonce : « Vous serez saints car je suis saint, moi, Yhwh votre Dieu. » La sainteté de Yhwh n’y est pas une quelconque qualité métaphysique, elle s’enracine dans l’œuvre de salut qu’a été la délivrance d’Egypte : « Je suis Yhwh votre Dieu qui vous ai fait sortir du pays d’Egypte » (Lv 19, 36). (Nouveau vocabulaire biblique p. 168)

 

Cette sainteté est redoutable, elle doit susciter la crainte puis la sagesse (v. 10) :

Ils proclament ton nom, grand et redoutable, car il est saint ! (Ps 98, 3)

 

La traduction latine Redemptionem misit populo suo suscite évidemment une lecture chrétienne du psaume : la rédemption offerte au peuple est celle du Christ sur la croix et elle renouvelle l’Alliance de Dieu scellée avec les hommes pour l’éternité.

 

Simon Vouet (1590-1649), "Crucifixion", Musée des Beaux-Arts de Lyon. (Photo Wikimedia commons)

Simon Vouet (1590-1649), "Crucifixion", Musée des Beaux-Arts de Lyon. (Photo Wikimedia commons)

10 La sagesse commence avec la crainte de Yhwh. Bien intelligents tous ceux qui la pratiquent. A jamais se maintiendra sa louange.

NV Initium sapientiae timor Domini, intellectus bonus omnibus facientibus ea ;

laudatio eius manet in saeculum saeculi.

VC Initium sapientiæ timor Domini : Intellectus bonus omnibus facientibus eum : laudatio eius manet in sæculum sæculi.

 

La crainte forme lien entre le v. 9 (redoutable est son nom) et le v. 10 (la sagesse commence avec la crainte de Yjwh)

Si la crainte peut représenter la peur des hommes face à toutes sortes de dangers, le même mot dans la bible désigne aussi celle qui accompagne l’approche du sacré :

 

Et il déclara : « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob. » Moïse se voila le visage car il craignait de porter son regard sur Dieu. (Ex 3, 6).

 

Ici c’est à l’immensité de la Sagesse divine que l’homme est invité à participer par sa crainte et son intelligence :

 

Or la Sagesse est avec toi, elle qui sait tes œuvres ; elle était là quand tu fis l’univers ; elle connaît ce qui plaît à tes yeux, ce qui est conforme à tes décrets. (Sg 9, 9)

 

Sagesse et intelligence sont constamment associés :

Le commencement de la Sagesse, c’est le désir vrai d’être instruit ; le souci de l’instruction, c’est l’amour. (Sg 6, 17)

 

Dieu donna à Salomon une sagesse et une intelligence très grandes, et un cœur aussi vaste que le sable au bord de la mer. (1 R 5, 9)

 

Puis il dit à l’homme : “La crainte du Seigneur, voilà la Sagesse, s’éloigner du mal, voilà l’Intelligence.” » (Jb 28, 28)

 

Mon fils, accueille mes paroles, conserve précieusement mes préceptes,

l’oreille attentive à la sagesse, le cœur incliné vers la raison.

Oui, si tu fais appel à l’intelligence, si tu invoques la raison,

si tu la recherches comme l’argent, si tu creuses comme un chercheur de trésor,

alors tu comprendras la crainte du Seigneur, tu découvriras la connaissance de Dieu.

Car c’est le Seigneur qui donne la sagesse ; connaissance et raison sortent de sa bouche. (Pr 2, 1-6)

 

L’homme est invité à partager la Sagesse qui a présidé à la création du monde et à devenir juste comme Yhwh :

 

Si l’intelligence humaine peut accomplir une œuvre, qui, plus que la Sagesse, est l’artisan de l’univers ?

Veut-on devenir juste ? Les labeurs de la Sagesse produisent les vertus : elle enseigne la tempérance et la prudence, la justice et la force d’âme, et rien n’est plus utile aux hommes dans l’existence. (Sg 8, 6-7)

 

Si on pratique une lecture chrétienne de ce psaume 110, on retrouve la même association sagesse et intelligence dans le Nouveau Testament ; le Messie annoncé par Isaïe associera en lui-même ces deux qualités :

Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur. (Is 11, 1-2)

 

Qualités que les fidèles seront aussi appelés à développer :

Depuis le jour où nous en avons entendu parler, nous ne cessons pas de prier pour vous. Nous demandons à Dieu de vous combler de la pleine connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelleAinsi votre conduite sera digne du Seigneur, et capable de lui plaire en toutes choses ; par tout le bien que vous ferez, vous porterez du fruit et vous progresserez dans la vraie connaissance de Dieu. (Col 1, 9-10)

 

Quelqu’un, parmi vous, a-t-il la sagesse et le savoir ? Qu’il montre par sa vie exemplaire que la douceur de la sagesse inspire ses actes. (Jc 3, 13)

 

Comme on le voit, cet objectif est à la fois intellectuel et éthique car sagesse et intelligence doivent être guidés par l’Esprit.

Sagesse, compréhension des Ecritures (= pleine connaissance de la volonté divine) et miracles sont liés chez Jésus :

Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? (Mc 6, 2)

 

Si l’impénétrabilité de Dieu peut provoquer une peur liée au vertige :

Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la connaissance de Dieu ! Ses décisions sont insondables, ses chemins sont impénétrables ! (Rm 11, 33)

 

La venue du Christ Jésus rassure en lui donnant taille humaine :

C’est grâce à Dieu, en effet, que vous êtes dans le Christ Jésus, lui qui est devenu pour nous sagesse venant de Dieu, justice, sanctification, rédemption. (1 Co 1, 30)

 

Saisis à notre tour par la Sagesse divine, dans la seule crainte de ne pas répondre à la proposition d’Alliance de Yhwh-Dieu, nous pouvons chanter avec le psalmiste et Paul :

A jamais se maintiendra sa louange (Ps 110, 10)

Car tout est de lui, et par lui, et pour lui. À lui la gloire pour l’éternité ! Amen. (Rm 11, 36)

 

Giusto de Menabuoi (1330-1390), "Christ Pantocrator". Détail de la fresque du Dôme de Padoue. (Photo Wikimedia commons)

Giusto de Menabuoi (1330-1390), "Christ Pantocrator". Détail de la fresque du Dôme de Padoue. (Photo Wikimedia commons)

Bibliographie

 

-        Louis Jacquet, « Les psaumes et le cœur de l’homme », t. III, Ed. Deculot, 1979, pp. 233-240.

-        Jean-Luc Vesco, « Le psautier de David », t. II, Ed. Cerf, Coll. Lectio Divina, 2006, pp. 1061-1068.

-        Nouveau vocabulaire biblique, sous la direction de J.-P. Prévost, Ed. Bayard, 2004. (Abrév. NVB)

 

 

 

Méditation en forme d’échos

 

 

01 Alléluia ! De tout cœur je rendrai grâce à Yhwh dans l'assemblée, parmi les justes.

 

Toutes les œuvres du Seigneur, bénissez-le, sur toute l'étendue de son empire ! Bénis le Seigneur, ô mon âme ! (Ps 102, 22)

 

Bénis le Seigneur, ô mon âme ; Seigneur mon Dieu, tu es si grand ! Revêtu de magnificence (Ps 103, 1)

 

Heureux est l'homme qui n'entre pas au conseil des méchants, qui ne suit pas le chemin des pécheurs, ne siège pas avec ceux qui ricanent,

mais se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit ! (Ps 1, 1-2)

 

Ce psaume, en effet, nous montre un homme qui bondit dans les tressaillements de sa joie ; il nous montre en figure ce peuple de Dieu dont le cœur exhale des flots d’amour, ou plutôt le corps du Christ, délivré de tous maux. (Saint Augustin, Commentaire sur le psaume 110, n° 1)

 

02 Grandes sont les œuvres de Yhwh ; tous ceux qui les aiment s'en instruisent.

 

Ils chantent le cantique de Moïse, serviteur de Dieu, et le cantique de l’Agneau. Ils disent : « Grandes, merveilleuses, tes œuvres, Seigneur Dieu, Souverain de l’univers ! Ils sont justes, ils sont vrais, tes chemins, Roi des nations. (Ap 15, 3)

 

 

03 Magnificence et splendeur dans ses actions : à jamais se maintiendra sa justice.

 

A propos de confessio dans VC (cf. commentaire), la proclamation publique ne concerne pas forcément une faute mais aussi une croyance, à laquelle peut s’ajouter une nuance laudative :

« Seigneur, je vous confesserai dans toute l’étendue de mon cœur ». Ce mot de confession ne marque pas toujours l’aveu des péchés, il exprime aussi la louange de Dieu confessée avec piété. L’une de ces confessions est donc dans les pleurs, l’autre dans la joie : l’une montre au médecin sa blessure, l’autre rend grâces de sa guérison. Cette confession de notre psaume nous montre un homme, non seulement délivré de tous maux, mais encore séparé de tous les méchants. Voyons dès lors en quel lieu il rend à Dieu cette confession dans toute l’étendue de son cœur. C’est, dit-il, dans le conseil, dans l’assemblée des justes ; de ces justes, je crois, qui seront assis sur douze trônes pour juger les douze tribus d’Israël ». Là, il n’y aura plus d’hommes d’iniquité. (Saint Augustin, Commentaire sur le Psaume 110)

 

 

04 De ses merveilles il a laissé un mémorial ; Yhwh est tendresse et pitié.

 

Le Seigneur fait œuvre de justice, il défend le droit des opprimés.

Il révèle ses desseins à Moïse, aux enfants d'Israël ses hauts faits.

Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d'amour ;

il n'est pas pour toujours en procès, ne maintient pas sans fin ses reproches ;

il n'agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses.

Comme le ciel domine la terre, fort est son amour pour qui le craint ;

aussi loin qu'est l'orient de l'occident, il met loin de nous nos péchés ;

comme la tendresse du père pour ses fils, la tendresse du Seigneur pour qui le craint !

Il sait de quoi nous sommes pétris, il se souvient que nous sommes poussière.

(Ps 102, 6-14)

 

 

05 il a donné de la nourriture à ceux qui le craignent, gardant toujours mémoire de son alliance.

 

Mais ils péchaient encore contre lui, dans les lieux arides ils bravaient le Très-Haut ;

ils tentaient le Seigneur dans leurs coeurs, ils réclamèrent de manger à leur faim.

Ils s'en prennent à Dieu et demandent : « Dieu peut-il apprêter une table au désert ?

Sans doute, il a frappé le rocher : l'eau a jailli, elle coule à flots ! Mais pourra-t-il nous donner du pain et procurer de la viande à son peuple ? »

Alors le Seigneur entendit et s'emporta, il s'enflamma de fureur contre Jacob, sa colère monta contre Israël.

car ils n'avaient pas foi en Dieu, ils ne croyaient pas qu'il les sauverait.

Il commande aux nuées là-haut, il ouvre les écluses du ciel :

pour les nourrir il fait pleuvoir la manne, il leur donne le froment du ciel ;

chacun se nourrit du pain des Forts, il les pourvoit de vivres à satiété. (Ps 77, 17-25)

 

Dans une lecture chrétienne le bienfait de cette nourriture s’applique à l’eucharistie :

Au désert, nos pères ont mangé la manne ; comme dit l’Écriture : Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. »

Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel.

Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. »

Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. »

Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif.

Mais je vous l’ai déjà dit : vous avez vu, et pourtant vous ne croyez pas. (Jn 6, 31-36)

James Tissot (1836-1902), "La récolte de la manne". (Photo Wikimedia commons)

James Tissot (1836-1902), "La récolte de la manne". (Photo Wikimedia commons)

06 Il a révélé à son peuple la puissance de ses œuvres, lui donnant l’héritage des nations.

 

J’établirai mon alliance entre moi et toi, et je multiplierai ta descendance à l’infini. Abram tomba face contre terre et Dieu lui parla ainsi : « Moi, voici l’alliance que je fais avec toi : tu deviendras le père d’une multitude de nations. Tu ne seras plus appelé du nom d’Abram, ton nom sera Abraham, car je fais de toi le père d’une multitude de nations. Je te ferai porter des fruits à l’infini, de toi je ferai des nations, et des rois sortiront de toi. (Gn 17, 2-6)

 

et[Yhwh] fit périr des rois redoutables, éternel est son amour ! …

pour donner leur pays en héritage, éternel est son amour !

en héritage à Israël, son serviteur, éternel est son amour !

(Ps 135, 18. 21-22)

 

 

07 Justice et vérité, les œuvres de ses mains, solidité, tous ses préceptes,

08 établis pour toujours et à jamais, mis en œuvre dans la droiture et vérité !

 

Quelle profusion dans tes œuvres, Seigneur ! Tout cela, ta sagesse l'a fait ; la terre s'emplit de tes biens. (Ps 103, 24)

 

Lui qui fit les cieux avec sagesse, éternel est son amour ! (Ps 135, 5)

 

C’est aussi l’affirmation de la puissance de Yhwh, le Créateur qui dépasse les idoles.

Mais c’est le feu, le vent, la brise légère, la ronde des étoiles, la violence des flots, les luminaires du ciel gouvernant le cours du monde, qu’ils ont regardés comme des dieux.

S’ils les ont pris pour des dieux, sous le charme de leur beauté, ils doivent savoir combien le Maître de ces choses leur est supérieur, car l’Auteur même de la beauté est leur créateur.

Et si c’est leur puissance et leur efficacité qui les ont frappés, ils doivent comprendre, à partir de ces choses, combien est plus puissant Celui qui les a faites.

Car à travers la grandeur et la beauté des créatures, on peut contempler, par analogie, leur Auteur. (Sg 13, 2-5)

 

Depuis la création du monde, on peut voir avec l’intelligence, à travers les œuvres de Dieu, ce qui de lui est invisible : sa puissance éternelle et sa divinité. Ils n’ont donc pas d’excuse, (Rm 1, 20)

 

« Ce que dit le Prophète revient donc à ceci, que les œuvres de Dieu sont disposées de telle sorte que les hommes attentifs et de bon sens reconnaissent qu'elles révèlent avec beaucoup de netteté, d'évidence et de clarté l'existence de Dieu à l'intelligence humaine. C'est surtout dans ce but que Dieu a disposé toutes choses dès le principe, afin qu'en voyant la grandeur, la beauté et l'ordre de la création, en voyant marcher et fonctionner toutes choses avec régularité, l'âme du spectateur s'émût, et que son intelligence s'éveillât à la recherche du Créateur et de l'architecte suprême, à la recherche de Dieu, et qu'elle adorât celui qui a fait ces choses, et qu'elle lût le secret de son existence dans la création, comme dans un livre. Le spectacle de la création nous est très utile non-seulement pour arriver à la connaissance de Dieu, mais encore pour régler notre conduite. » (Saint Jean Chrysostome, Commentaire sur le psaume 110)

 

« Par la parole du Seigneur les cieux ont été faits » (Ps 33, 6). Il nous est ainsi indiqué que le monde est issu d’une décision, non du chaos ou du hasard, ce qui le rehausse encore plus. Dans la parole créatrice il y a un choix libre exprimé. L’univers n’a pas surgi comme le résultat d’une toute puissance arbitraire, d’une démonstration de force ni d’un désir d’auto-affirmation. La création est de l’ordre de l’amour. L’amour de Dieu est la raison fondamentale de toute la création : « Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de dégout pour rien de ce que tu as fait ; car si tu avais haï quelque chose, tu ne l’aurais pas formé » (Sg 11, 24). Par conséquent, chaque créature est l’objet de la tendresse du Père, qui lui donne une place dans le monde ... (Laudato Si’, n° 77)

 

 

09 Il apporte la délivrance à son peuple ; son alliance est promulguée pour toujours : saint et redoutable est son nom.

 

Mais à présent, courage, Zorobabel ! – oracle du Seigneur. Courage, Josué fils de Josédeq, grand prêtre ! Courage, tout le peuple du pays ! – oracle du Seigneur. Au travail ! Je suis avec vous – oracle du Seigneur de l’univers –, selon l’engagement que j’ai pris envers vous à votre sortie d’Égypte. Mon esprit se tient au milieu de vous : Ne craignez pas ! (Ag 2, 4-5)

 

Nicolas Poussin (1594-1665), "Le passage de la mer rouge" (Photo Wikimedia commons)

Nicolas Poussin (1594-1665), "Le passage de la mer rouge" (Photo Wikimedia commons)

10 La sagesse commence avec la crainte de Yhwh. Bien intelligents tous ceux qui la pratiquent. A jamais se maintiendra sa louange.

 

Sagesse et connaissance, tels sont les biens qui sauvent ; la crainte du Seigneur, c’est là le vrai trésor (Is 33, 6 ; trad. Psautier de Ligugé)

 

Alors ceux qui craignent le Seigneur s’exhortèrent mutuellement. Le Seigneur fut attentif et les écouta ; un livre fut écrit devant lui pour en garder mémoire, en faveur de ceux qui le craignent et qui ont le souci de son nom. (Ml 3, 16)

 

Heureux l’homme qui médite sur la Sagesse et réfléchit avec intelligence, qui applique son cœur à connaître les voies de la Sagesse, à bien discerner ses chemins. (Si 14, 20-21 ; trad. Psautier de Ligugé)

 

« Dieu de mes pères et Seigneur de miséricorde, par ta parole tu fis l’univers,

Tu formas l’homme par ta Sagesse pour qu’il soit maître de tes créatures, qu’il gouverne le monde avec justice et sainteté, qu’il rende, avec droiture, ses jugements.

Donne-moi la Sagesse, assise auprès de toi ; ne me retranche pas du nombre de tes enfants : je suis ton serviteur, le fils de ta servante, un homme frêle et qui dure peu, trop faible pour comprendre les préceptes et les lois.

Le plus accompli des enfants des hommes, s’il lui manque la Sagesse que tu donnes, sera compté pour rien. (Sg 9, 1-6)

 

Quelqu’un, parmi vous, a-t-il la sagesse et le savoir ? Qu’il montre par sa vie exemplaire que la douceur de la sagesse inspire ses actes. (Jc 3, 13)

 

« Dans ce passage, ce que veut le Prophète, ce n'est pas seulement un auditeur, mais un homme qui pratique. « La véritable intelligence est en ceux qui l'éprouvent, » c'est-à-dire ceux qui pratiquent la sagesse et qui le montrent par leurs actions, ceux-là ont la véritable intelligence. « La bonne et véritable intelligence, » dit-il, car il y a la fausse et mauvaise intelligence, comme lorsqu'il lit : « Ils sont sages pour faire le mal, mais ne savent pas faire le bien. » (Jérém. IV, 22.) Ce qu'il veut, c'est que l'intelligence soit mise au service de la vertu. (Saint Jean Chrysostome, Commentaire sur le psaume 110)

Atelier Rackeve, "Christ Pantocrator" (1760-70), Eglise grecque orthodoxe et Musée de Miskolc. (Photo Wikimedia commons)

Atelier Rackeve, "Christ Pantocrator" (1760-70), Eglise grecque orthodoxe et Musée de Miskolc. (Photo Wikimedia commons)

Méditation musicale (grégorienne …)

 

2ème psaume des vêpres du dimanche et de certaines fêtes :

+ Grégorien : après l’antienne « Fidelia omnia mandata eius, confirmata in saeculum saeculi » (Ps 110, 7-8), par les moines de Solesmes :

https://www.youtube.com/watch?v=dcgshwWiDFs

 

Par le chœur des moines d’abbaye de Keur Moussa au Sénégal (psalmodié en français) :

https://www.youtube.com/watch?v=I_RJwaIiCms

 

Par le chœur des moines de l’abbaye de Tamié (psalmodié en français aux Laudes du jeudi :

https://www.youtube.com/watch?v=7-uiJW0t7BE

 

Par le chœur des moines de l’abbaye de Belloc (psalmodié en français) :

https://www.youtube.com/watch?v=5RXnzcYusAg

 

 

 

  • Le psaume 110 « Confitebor tibi Domine » a été mis en musique par de nombreux compositeurs (paroles latines de la Vulgata Clementina) :

+ Pergolèse :

https://www.youtube.com/watch?v=gtRApoMMZ4k

+ Delalande :

https://www.youtube.com/watch?v=Y4IjjqK9Gy8

+ Monterverdi :

https://www.youtube.com/watch?v=tFbF5WULrVM

https://www.youtube.com/watch?v=LIa2kL_ylIs

+ Vivaldi :

https://www.youtube.com/watch?v=Rahyn7HD3Jg

+ Caldara :

https://www.youtube.com/watch?v=PNH14quYX3Q

+ Charpentier :

https://www.youtube.com/watch?v=eBAYIMhysPQ

+ Buxtehude :

https://www.youtube.com/watch?v=zTCGSR_8vC4

 

 

Pièce grégorienne :

 Une seule pièce grégorienne du Propre est inspirée du psaume 110 (tout au moins dans celles qui ont été maintenues)

V. 9 : Alleluia Redemptionem misit Dominus in populo suo pour la quatrième semaine du temps pascal.

 

Par une voix soliste avec défilement de la mélodie :

https://www.youtube.com/watch?v=6z4cYFtBHQo

Par les moines de Solesmes avec la mélodie :

https://www.youtube.com/watch?v=uhzVxUU2adM

Il est possible de suivre la Liturgie grégorienne des Vêpres sur deux sites :

-          Monastère bénédictin Sainte-Madeleine du Barroux (à 17h30 tous les jours) : https://www.barroux.org/fr/liturgie/ecoutez-nos-offices.html

-          Monastère bénédictin Notre-Dame de Triors (à 17h, les dimanches et fêtes) :

https://radio-esperance.fr/

Manuscrit de Fécamp (fin XV° - début XVI° s.), Musée Bénédictine de Fécamp (Photo BVMM)

Manuscrit de Fécamp (fin XV° - début XVI° s.), Musée Bénédictine de Fécamp (Photo BVMM)

Autres traductions

 

Traduction paraphrasée en vers de Pierre Corneille (1606-1684)

 

Cette traduction fait partie de l’ « Office de la Saint Vierge traduit en françois, tant en vers qu’en prose avec les sept psaumes pénitentiaux, les vêpres et complies du dimanche et tous les hymnes du bréviaire romain par Pierre Corneille (1670) »

 

Ce livre était destiné à ceux qui voulaient s’unir à la prière officielle (bréviaire) de l’Eglise. Il est dédicacé à la Reine Marie-Thérèse d’Autriche, mariée à Louis XIV en 1660, morte en 1683.

Les typographies des livres anciens ont leur charme. Aussi ai-je choisi de vous présenter cette traduction-paraphrase scannée à partir de l’ouvrage : Œuvres de Pierre Corneille, Les grands Ecrivains de la France, Tome IX, Librairie de L. Hachette et Cie ; Paris, 1862 ; pp. 303-307.

 

Les vêpres du dimanche - Psaume 110 (hb 111)
Les vêpres du dimanche - Psaume 110 (hb 111)
Les vêpres du dimanche - Psaume 110 (hb 111)
Statue du Christ Rédempteur, Rio de Janeiro (1926-1931)

Statue du Christ Rédempteur, Rio de Janeiro (1926-1931)

Traduction paraphrasée de Paul Claudel

 

Entre 1918 et 1953, Claudel composa un vaste ensemble de « Psaumes » traduits du latin de la Vulgate, dont seuls un petit nombre furent publiés de son vivant en trois minces recueils. S’il eut jamais le désir de réaliser un psautier complet, il ne parvint pas au bout de l’entreprise : alors que certains psaumes connaissent deux ou trois versions différentes au fil des années, d’autres semblent entièrement ignorés du poète … A la lettre du texte, il surimpose un contexte liturgique, des réalités chrétiennes, mais aussi ses propres préoccupations d’homme et de croyant. Le texte des psaumes en paraît profondément bouleversé, modernisé, parfois méconnaissable …

(extrait du site internet de la Société Paul Claudel : http://www.paul-claudel.net/book/psaumes )

 

Psaume 110 (Paris, 17/10/1947) de Paul Claudel (« Psaumes – Traductions 1918-1953 », Ed. Gallimard, 1966, éd. 2008 p. 215-216)

 

1         Ohé, les bonnes gens, peut-être que ce n’est pas trop de tous ensemble pour apprendre au bon Dieu que l’on est content de Lui !

2         Dites, c’est beau, ce qu’Il a fait pour nous, c’est d’une adresse à ne pas y croire !

3         On en a plein le cœur de Sa magnificence et Sa justice marche au travers des siècles en triomphe.

4         On a quelqu’un pour penser à nous qui a de la mémoire, plein de tendresse et de pitié.

5-7     Quand on est d’accord avec Lui, c’est du pain qu’Il nous met dans la bouche pour le manger.

            Ce qu’Il fait, la saveur que ça a, ça l’amuse de goûter que nous le goûtons.

            Toutes les nations du monde n’ont été faites que pour nous pour que nous en profitions. Ses mains ne sont que vérité et justice.

8         C’est une chose, Sa justice, un jour et autre chose l’autre fois, les siècles vont leur chemin, ça ne change pas, ça marche dans la vérité et la justice.

9         Il a envoyé Quelqu’un pour payer à notre place, Il a signé quelque chose avec nous.

            Son nom est saint et terrible.

10       La peur qu’on a de Lui faire de la peine, c’est par là, mes petits enfants, pour nous que ça commence à marcher.

            Travaillons là-dessus avec tout l’esprit que nous pourrons, et les siècles passés se lèveront derrière nous pour dire bravo !

 

Marc Chagall, Le vitrail de la Création, cathédrale de Metz (1959-1963)

Marc Chagall, Le vitrail de la Création, cathédrale de Metz (1959-1963)

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